Depuis la fin 2024, la FNIM interroge ses adhérents sur les difficultés qu’ils rencontrent au quotidien avec leurs clients de l’industrie pharmaceutique. Briefs flous ou incomplets, délais de plus en plus serrés, turn-over des interlocuteurs… autant de problématiques qui compliquent la concrétisation de projets, de commandes, et dégradent la qualité des échanges. Depuis un an, donc, la FNIM s’interroge sur la façon de bâtir un recueil de bonnes pratiques pour fluidifier, faciliter, agrémenter les relations avec les laboratoires pharmaceutiques. Le 19 novembre 2025, lors de la Matinale mensuelle de la FNIM, organisée à la fois dans les locaux du Roof Top Grenelle à Paris et en visioconférence, les premières pistes d’un guide, voire d’un référentiel de « bonnes pratiques » ont été présentées, puis débattues. Ces discussions, animées par Thierry Kermorvant, directeur des stratégies santé au sein du Groupe La Phratrie, et le président de la FNIM Pierre-Louis Prost, également directeur associé de l’agence KPL, ont débouché sur 10 propositions concrètes, véritable ossature du guide en préparation et dont la rédaction sera bouclée début 2026.
« Nos métiers de communicants dans le domaine de la santé ont beaucoup évolué depuis ces dernières années, en particulier depuis le Covid. Et ce, pas toujours dans le bon sens. La multiplication des réunions en distanciel, par exemple, contribue à une certaine dégradation des échanges avec les acteurs de l’industrie pharmaceutique », constate Thierry Kermorvant, directeur des stratégies santé au sein du Groupe La Phratrie. À cela s’ajoute des briefs incomplets, une pression budgétaire ou encore un turn-over des équipes qui complique le suivi d’un projet… Autant de problématiques confirmées par une enquête menée auprès des adhérents de la FNIM, fin 2024. D’où l’idée de rédiger un guide de « bonnes pratiques » destinés aux industries de santé, en vue de fluidifier les collaborations et partenariats futurs. « Ce guide, ou référentiel, vise à défendre nos valeurs et l’expression de notre créativité lors de projets menés avec les industries de santé. Et ce, dans une logique commune aux agences, prestataires et laboratoires pharmaceutiques. À savoir : l’amélioration de la vie des patients », détaille Thierry Kermorvant. L’ambition de la FNIM se résume donc à « formaliser les conditions d’une collaboration exemplaire, où expertise scientifique, créativité et rigueur réglementaire se conjuguent pour engendrer de la valeur durable ».
Vers une reconnaissance mutuelle
Ce projet de guide ne se rajoute pas à des outils déjà existants. Au contraire. « Il vient compléter un écosystème », souligne Pierre-Louis Prost, directeur associé de l’agence KPL et president de la FNIM. Thierry Kermorvant cite notamment la charte « La belle compétition », qui ébablit les bonnes pratiques des appels d’offre entre annonceurs et agences, ou encore les précédentes chartes élaborées par l’Association des Agences Conseil et Création (AACC), qui défend les intérêts des agences auprès des pouvoirs publics, des annonceurs, des médias… « Le référentiel de la FNIM, pour sa part, prône une excellence relationnelle au quotidien entre communicants et industries de santé », reprend Thierry Kermorvant. Un référentiel qui s’articule autour de « 10 engagements fondateurs ». À commencer par « la reconnaissance mutuelle » entre agences, prestataires et laboratoires pharmaceutiques. Le directeur des stratégies santé du Groupe La Phratrie souhaite aller vers « un prolongement d’équipe » et parle de « partenariat d’égal à égal, le plus en amont possible d’un projet ». Les industries de santé s’engagent ainsi à valoriser les succès communs et forment leurs nouveaux collaborateurs au rôle des agences et prestataires. Quant à ces derniers, « ils sont en capacité de démontrer la pertinence d’une action de com’ par des études ROI post-campagne, maintenir une veille active – réglementaire, concurrentielle, IA… - et la partager pro-activement, mais aussi proposer des « innovation days » pour challenger les briefs », détaille Thierry Kermorvant. L’objectif visé par la FNIM ? « Un taux de renouvellement des collaborations supérieur à 70% au-delà de 3 ans. »
Stabilisation des briefs et transparence budgétaire
Deuxième piste du référentiel en cours d’élaboration : la structuration du brief de départ. Et pour cause : l’enquête menée par la FNIM fait état de « changements de brief en cours » dans 86,5% des cas. D’où l’attente, de la part des agences et prestataires, d’un interlocuteur décisionnaire identifié dès le départ, mais aussi d’un « brief écrit, validé avec le réglementaire en amont, qui inclut le contexte stratégique, les objectifs SMART, les cibles, les contraintes, le budget, les délais et autres critères d'évaluation ». À cela s’ajoute un kick-off obligatoire – en présentiel de préférence - de 2 heures minimum pour des projets dont les budgets dépassent les 50K€. De leur côté, agences et prestataires s’engagent à reformuler ou compléter un brief si besoin, voire faire preuve de pédagogie et proposer une méthodologie adaptée. L’ambition de la FNIM ? Parvenir à 80% de briefs « stables ». Quant à la transparence budgétaire – 3e piste du guide -, elle participle à « la relation de confiance » entre les parties. Or, selon l’enquête de la FNIM, le budget n’est communiqué d’emblée par l’industrie pharmaceutique que dans 1,5% des cas et « rarement ou de temps en temps » dans 46% des situations. Les agences et prestataires sont donc en attente d’un budget dans 100% des projets et de négociations « respectueuses des marges et contraintes économiques ». En contrepartie, ils s’engagent à proposer des devis à la fois « détaillés et expliqués », avec une création de valeur pour chaque poste et chaque coût. À terme, la FNIM plancherait volontiers sur l’élaboration d’une grille tarifaire, « à co-construire avec l’AACC et Les entreprises du médicament (LEEM) ».
Délais réalistes, stabilité du périmètre et rémunération du travail supplémentaire
Le constat est sans appel : selon l’enquête de la FNIM, 40,5% de ses adhérents interrogés estiment que « les clients ne respectent jamais les délais qu’ils imposent ». Ce qui complique sérieusement les conditions de travail et de livrable. « La qualité doit prendre le pas sur l’urgence », estime Thierry Kermorvant. D’où l’importance d’avoir des « délais réalistes » de la part des industries de santé – 4e bonne pratique -. C’est-à-dire des délais « compatibles avec la qualité attendue et les contraintes réglementaires ». Par ailleurs, agences et prestataires comptent sur des délais de validation de « 10 jours ouvrés maximum », avant de pouvoir facturer. En contrepartie, ils s’engagent à alerter en cas de délais impossibles à tenir et proposer des alternatives planifiées, respecter les délais convenus, informer de tout retard et le justifier. Autre bonne pratique à instaurer – la 5e - : la stabilité du périmètre ou autre champ de travail et d’investigation. Selon l’enquête de la FNIM, 43% des adhérents sollicités font état de « changements d’objectifs » de la part des laboratoires pharmaceutiques, en cours de route. 40% évoquent également des changements de budget, au fil d’un projet. Agences et prestataires réclament donc davantage de précisions et d’engagements sur les briefs, objectifs et budgets. En contrepartie, ils promettent « un document partagé de suivi des changements, un chiffrage systématique des évolutions de scope et une flexibilité constructive face aux impératifs liés au business ». Dans cette même logique, tout travail supplémentaire réalisé par une agence ou un prestataire doit être rémunéré de façon « équitable » - 6e piste du guide -. Or, selon l’enquête de la FNIM, « 30% du travail supplémentaire n’est jamais, voire rarement rémunéré à sa juste valeur ». Face à cela, agences et prestataires s’engagent à « une estimation réaliste et transparente des tâches supplémentaires » et attendent des industries de santé « une reconnaissance et une rémunération juste de tout travail hors scope initial ». Le tout après validation des tâches supplémentaires, tarif et méthode de calcul à l’appui. La FNIM espère atteindre ainsi un taux de rémunération du travail supplémentaire supérieur à 90%.
Pour une humanisation des relations
La FNIM s’interroge également sur les comportements à adopter, de part et d’autre, face à un abandon de projet. Car, selon son enquête, 43% des agences et prestataires ne reçoivent aucun dédommagement dans ce type de situation. Une 7e bonne pratique résiderait donc à demander aux industries de santé « des modalités de dédommagement contractuelles claires et équitables définies en amont », ainsi qu’une « discussion de solutions alternatives avant toute décision définitive d'abandon ». De leur côté, agences et prestataires s’engagent à une « communication régulière pour identifier les signaux faibles » et à « une facturation proportionnelle au travail effectué ». La FNIM vise, à terme, « le dédommagement de 100% des projets abandonnés après la validation d’un brief ». «Retrouver du lien » et « l’humanisation des relations » font également partie des bonnes pratiques – la 8e – revendiquées et défendues par la FNIM. Fini les visioconférences sans caméra allumée pour certains ! Fini aussi le turn-over des équipes sans présentation des nouveaux venus. Les agences et prestataires réclament à l’industrie pharmaceutique davantage de réunions en présentiel, un taux d’ouverture des caméras de plus de 90% en visio, une stabilité des interlocuteurs tout au long d’un projet et une formation des jeunes recrues. En contrepartie, ils se disent prêts à accueillir des juniors, ainsi que des alternants dans leurs murs, le temps d’un stage d’immersion. Autres engagements des agences et prestataires vis-à-vis des industries de santé : une continuité des équipes dédiées au compte et un chef de projet unique. Autant d’initiatives pour faire grimper le taux de satisfaction relationnelle – à calculer et publier chaque année - à plus de 75%.
Collaboration constructive et amélioration continue
Les réflexions et les échanges en vue de définir quelques bonnes pratiques ont également porté sur la nécessité d’une collaboration « constructive » avec les services achats de l’industrie pharmaceutique – 9e piste -. Et pour cause : actuellement, 3% seulement des services achats facilitent la collaboration avec les agences et prestataires, selon l’enquête de la FNIM. C’est peu. L’objectif visé flirte avec les 50% de taux de satisfaction. Pour atteindre ce résultat, agences et prestataires préconisent un « dialogue pédagogique sur la création de valeur » avec les services achats. Car travailler avec l’IA, par exemple, n’est pas toujours synonyme de gain de temps ou de budget à la baisse. Cela engendre la sollicitation d’experts formés et aguerris : on ne s’improvise pas prompteur. En outre, prompter peut parfois être plus chronophage que de ne pas recourir à l’IA… La FNIM suggère aussi l’implication, en amont, des services achats pour une co-construction des cahiers des charges, ainsi qu’une participation – une à deux fois par an – aux Matinales de la FNIM, pour échanger, mieux se connaître mutuellement avec les communicants en santé. Enfin, la FNIM pointe – en 10e bonne pratique – l’importance d’avoir un feedback, pour les agences et prestataires, à l’issue d’une participation à un appel d’offre. Il s’agit, ici, de prendre en compte remarques et critiques « de façon constructive », pour informer et redynamiser les équipes. Quant aux acteurs de l’industrie pharmaceutique, ils sont invités à répondre après la remise de recommandations « dans un délai maximum de 10 jours ».
Rédaction du guide et diffusion prévues début 2026
La rédaction du contenu de ce guide – ou référentiel – de bonnes pratiques sera finalisée début 2026. La suite ? Ce texte – voire cette charte – se destine à être présenté aux LEEM, SNITEM, CRIP... Il pourrait également faire l’objet d’une campagne de communication commune avec le Club Santé AACC et d’une présentation de son contenu aux services achats, à l’occasion d’une Matinale de la FNIM. À terme, ce document sera remis lors de chaque brief avec l’industrie pharmaceutique et intégré dans les programmes des Masters en communication santé, le temps d’une intervention d’un membre de la FNIM. Autant d’engagements qui œuvrent à la fois pour un « mieux-être » au travail de chacun et une transmission des messages, des communicants jusqu’aux patients, dans des conditions optimales.






