Approches du ROI Digital
de gauche à droite : Thibaud Guymard , Pierre Ferrer, Dr.Vincent Varlet, Eric Phélippeau
ROI ? KPI ? De quoi parlons-nous ? Bien définir ces notions et mieux comprendre les mécanismes de la mesure du rendement des actions de marketing communication dans l’univers numérique, tel était le thème de la dernière matinale de la FNIM. Pour nous guider dans cette « approche » du ROI, trois « copilotes » étaient invités : Pierre Ferrer, le Dr Vincent Varlet et Thibaud Guymard*.
« Il est essentiel de mesurer régulièrement l’efficacité des opérations de marketing et communication ». Exposé de Pierre Ferrer.
« Le ROI, return on investment, est une question lancinante dans tous les secteurs économiques et a fortiori dans le domaine du marketing. Au début du XXème siècle, John Wannamaker, un annonceur américain déclarait déjà : « Je sais que la moitié de mon budget est gaspillée, mais je ne sais pas laquelle ! ». Cela traduit la difficulté à mesurer ce que l’on obtient en retour des investissements publicitaires. Un siècle plus tard, Rex Briggs, un spécialiste de l’efficacité du ROI en marketing, conclut l’un de ses travaux de recherche par ce constat : « Un tiers des budgets des annonceurs est gaspillé du fait d’une mauvaise allocation budgétaire ». Mais, techniquement, qu’est-ce que le ROI ? C’est le rapport entre le bénéfice attendu et le coût complet des actions engagées. Ce rapport doit être supérieur à 1. De quoi parle-t-on en terme de bénéfice attendu, de retour sur investissement ? Quels sont les indicateurs du profit ou du bénéfice obtenu par le marketing et la communication ? On en distingue 5 :
- le CA supplémentaire
- le résultat brut d’exploitation
- le nombre de boîtes vendues avant/après les actions engagées
- le nombre de prescripteurs du produit
- un indicateur d’image ou de notoriété
On aura reconnu là les fameux KPI (pour Key Performance Indicators). J’ai évoqué à l’instant la notion de coût complet. Pourquoi complet ? Parce qu’il intègre à la fois le budget (achats de prestations) et les coûts internes des équipes de l’annonceur (salaires des chefs de produit, des assistantes, coût des locaux, du matériel informatique, bref tout ce qui entre dans le compte d’exploitation).
En conclusion, il faut prévoir un minimum d’argent (jusqu’à 10% du budget) pour pouvoir faire des études régulières sur la mesure des opérations de marketing et communication, et ainsi assurer un suivi, sachant qu’on ne mesure jamais des valeurs absolues, mais toujours des évolutions ».
« Le ROI, c’est le patient ». Exposé du Dr Vincent Varlet.
« Je crois beaucoup au ROI digital dans la santé. Quelles sont aujourd’hui nos certitudes ? Depuis longtemps, nous sommes persuadés de l’efficacité des canaux de communication traditionnels : VM, RP, PLV, phoning, FMC etc. Pourtant, quels sont les effets de ces canaux en termes de vente ? On sait que même sans l’action d’un VM, un laboratoire arrive à maintenir 80 à 85% de la moyenne de la vente, probablement parce que les autres canaux contribuent à ce maintien. En conséquence : faut-il un KPI pour chaque canal ? Est-il chiffré ou qualitatif ? Un mailing postal peut-il être mesuré avec le même indicateur qu’un phoning ? Je crois qu’il faut plutôt mesurer une stratégie globale multicanal par opérations. Mais il ne faut pas oublier que dans la pharma, le ROI, c’est le patient : quel est son besoin ? Quel est son avis sur les KPI ? Comment veut-il interagir avec notre campagne ? Autrement dit, on doit intégrer le patient dans le calcul du ROI marketing, mais aussi nous définir comme relai, notamment avec les professionnels de la santé. Si l’on regarde de près le ROI digital, on découvre une multitude de e-quelques choses - site, e-learning, e-marketing, e-congress,e-mook (magazines interactifs) – sans compter le web documentaire, les adwords, les popups, cookies, layers et autres bannières…
Quand on cherche un équivalent classique ou analogique à la foison d’outils numériques actuels, on trouve une correspondance terme à terme : face au site, on avait une plaquette institutionnelle, au classeur ADV/e-ADV, à la fiche poso/mobile apps, aux house organs/e-mooks, à l’encartage/cookies etc. Si l’on compare maintenant les outils classiques aux digitaux (voir slide), on s’aperçoit que la nature des KPI évolue. Ainsi pour une fiche poso, on avait (éventuellement) un KPI qualitatif, mais pour une appli, on a plutôt (et facilement) un KPI quantitatif. Il est clair qu’avec les outils digitaux, on obtient beaucoup plus d’informations, en particulier lorsqu’il y a de l’interaction. Au total, on remarque qu’un canal ne fonctionne pas tout seul et il ne sert à rien de parler de ROI sur un seul canal : il vaut mieux envisager un KPI sur un canal au sein d’une stratégie globale multicanal, car il faut faire de la diversité en fonction des appétences des cibles. Ce qui est sûr, c’est que le digital, dans la santé, est devenu incontournable car on sait que si l’on fait l’impasse sur lui, on est certain que le ROI sera négatif. De plus, le digital est générateur de bénéfices pour tout le monde : pour le patient car il va être mieux suivi, pour les PS qui vont pouvoir mieux soigner ou conseiller, pour les laboratoires et les prestataires qui créent de la valeur ajoutée et in fine, pour la santé publique et les comptes de la sécurité sociale. Et puis, si un tiers des prescripteurs de la santé ont aujourd’hui 60 ans, on imagine que dans 5 ans, il y aura une révolution dans les comportements vis-à-vis des outils numériques… ».
« Tout repose sur les objectifs ». Exposé de Thibaud Guymard.
« L’industrie pharmaceutique va devoir accélérer sa mutation digitale, moins parce qu’elle a compris que les canaux numériques deviennent indispensables qu’à cause de l’évolution de l’environnement. Par exemple, on constate depuis 10 ans une baisse de plus en plus marquée du nombre de VM en France jusqu’à se rapprocher, peut-être, du modèle anglo-saxon. Or, il va bien falloir continuer à faire de la promotion produit, mais aussi parler d’autre chose que le produit : apporter des services et des solutions thérapeutiques soit aux patients, soit aux PS. En fait, tout dépend des objectifs. Quelles sont les problématiques que rencontrent les industriels et les clients et pour lesquelles ils auraient un besoin de ROI, d’une mesure de la performance globale et sur le long terme ? Une enquête britannique multicanal montre qu’en termes de contenus ((actualités, nouveautés) l’e-mail marketing, le SEO (optimisation des moteurs de recherche) et le content marketing (stratégie éditoriale de contenus medias) apparaissent comme les canaux ayant le meilleur ROI. Chez MSD, par exemple, l’e-mail marketing, on connaît : avec le site de services Univadis, qui fédère plus de 200 000 PS et représente une gigantesque base e-mail, on envoie des millions de mail par an. Comment mesure-t-on le ROI d’Univadis ? On ne vend rien, donc ce qui compte c’est l’aspect qualitatif de la relation avec l’internaute, le temps passé sur tel module FMC ou sur tel module e-learning. Toujours sur Univadis, il y a une page face book que l’on utilise pour faire la promotion de nouveaux services et dans ce cas, le ROI est relativement satisfaisant : pour la promotion, les médias sociaux semblent ainsi assez efficaces. Et si l’on faisait une association e-mail + réseaux sociaux, on augmenterait encore l’efficacité. Ce qui tend à prouver, par expérience, que multiplier les canaux peut faire le succès d’une campagne, à condition de maîtriser les canaux ».
Denis Briquet pour la FNIM
*Pierre Ferrer, consultant en marketing et communication, ancien directeur technique de l’UDA en charge notamment du Comité santé ; Vincent Varlet, directeur Exécutif des services Marketing et Communication Novartis Pharma S. A. S ; Thibaud Guymard, Digital Marketing Manager MSD France.